Nakk, l’interview de Booska-p

Nakk, l'interview de Booska-p

Nakk aura dû attendre ses 34 ans pour que son premier album voit le jour, en 2010. Désormais, le rappeur originaire de Bobigny prévoit de sortir des projets à une fréquence plus rapprochée, ce qu’il a commencé à faire avec Darksun l’an dernier. Au cours de cet entretien accordé à Booska-P, l’ancien membre du groupe Soldafada évoque son avenir dans le rap avec sérénité et revient sur quelques moments-clés de sa carrière.

Plus de deux après la sortie de ton album, Le monde est mon pays, quel bilan dresses-tu concernant ce disque ?

J’ai eu de bons retours mais comme il s’agissait d’un projet qui avait été repoussé maintes et maintes fois, on m’attendait au tournant. Certains auditeurs ont été déçus. Toutes proportions gardées, c’est un peu comme le Detox de Dr. Dre : on l’a tellement attendu, donc même s’il est bon, on ne le trouvera quand même pas si bien que ça. Il n’y a pas eu beaucoup de promo, alors que l’attente était grande. Toutefois, globalement, les retours sont positifs dans l’ensemble.

Commercialement, tes attentes ont-elles été satisfaites ?

Non, la sortie a été mal amenée. En indépendant, cela ne pardonne pas. C’était trop décousu, j’ai balancé trop d’extraits, alors que je n’avais pas de date de sortie précise. Au niveau de la promotion, cela manquait clairement de dynamisme.

Quelle a été ta réaction lorsque tu as pris connaissance des premiers scores ?

C’est un peu comme quand tu n’as pas le bac parce que tu n’as pas révisé. Tu es dégoûté mais, en réalité, il n’y a pas de surprise. On a toujours un petit Espoir mais j’avoue que je n’étais pas hyper confiant au moment de la sortie. Au final, il est quand même bien parti et m’a surtout permis de me rétablir sur la carte du rap.

« Dès qu’on parle d’album, on se met la pression »

L’année dernière, tu as enchaîné avec le projet Darksun. Tu as certainement pris conscience que le « game » actuel ne pardonne pas quand un rappeur ne donne pas assez rapidement de ses nouvelles ?

Oui, ça va tellement plus vite qu’à l’époque. On consomme le rap plus rapidement aujourd’hui. D’un côté, cela ne me dérange pas, je m’y suis fait. On vit dans une autre époque. Je fais figure d’ancien et un ancien qui n’a pas compris cette réalité, cela va être très compliqué pour lui…

Connais-tu certains anciens dans ce cas ?

Oui, j’en connais, mais je ne citerai pas de nom par respect.

Quelles ont été les principales différences d’approches entre Le monde est mon pays et Darksun ?

La promo était beaucoup plus élaborée et logique pour le dernier projet. J’ai envoyé les clips dans les temps et dans un ordre qui m’a été bénéfique. Au niveau de l’écriture, c’était nettement plus spontané que pour l’album. Il y avait également beaucoup moins de pression que pour Le monde est mon pays. Hélas, dès qu’on parle d’album, on a Tendance à se la mettre.

« A ma grande surprise, le public est de plus en plus jeune »

Quels sont les projets à venir ?

J’aimerais bien sortir quelque chose avant la fin de l’année, je ne sais pas encore sous quelle forme. Je souhaiterais vraiment balancer de nouveaux titres avant d’attaquer le fameux prochain album.

Quand tu dis fameux, on a l’impression que c’est comme si tu parlais du premier véritable album, non ?

Oui, parce que dès que je vais annoncer mon album, les fans vont attendre le projet du siècle.

Comment imagines-tu ton avenir dans le rap ?

Je ne sais pas encore combien de temps je vais rapper. A un moment, je pense créer des trucs basés uniquement sur l’écriture et qui sortiront des codes du rap. Je me vois bien faire quelque chose en rapport avec le texte, mais pas forcément dans le domaine du rap. Par exemple, écrire des scénarios, des concepts pour la télé, etc. Pour le moment, je n’ai pas encore été sollicité pour ce type de projets mais je pense pouvoir être crédible à ce niveau là.

A quoi ressemble le public de Nakk aujourd’hui ?

Franchement, c’est la question que je me posais il n’y a encore pas si longtemps. Avec Darksun, je sais qu’il s’est considérablement rajeuni. Après, je ne sais même pas si les anciens écoutent toujours. Lors des concerts, je me rends compte que le public est très jeune, de plus en plus jeune même. A ma grande surprise…

Tu as toujours bénéficié de cette image assez noble de lyricitse. Aujourd’hui, ne trouves-tu pas qu’on assiste à un retour des textes plus soignés dans le rap français ?

Oui, carrément. Je pense d’ailleurs que je bénéficie directement de ce retour des textes soignés. Les succès de Youssoupha et de 1995 n’y sont pas étrangers. Cela ouvre des portes.

« J’ai dû toucher 90 000 euros d’avance chez BMG »

Petit retour en arrière. A une époque, tu avais un contrat avec une major, BMG. Comment envisageais-tu ta carrière à ce moment-là ?

J’avais reçu une somme plutôt sympa. En gros, j’ai dû toucher 90 000 euros sur trois années si l’on cumule toutes les avances. J’avais 24 ans ans, dans ma tête j’allais vraiment vivre du rap. C’était une autre époque.

As-tu pu rembourser ces avances ?

Non. Ils m’ont rendu mon contrat, donc nous étions quitte au niveau de la production. En fait, les gens qui m’ont fait signer se sont faits licencier. Une nouvelle équipe est ensuite arrivée avec ses artistes et m’a simplement expliqué que c’était terminé pour moi.

T’attendais-tu à cette issue ?

Non, mon album était fini. Naïvement, je me suis dit qu’ils allaient écouter et qu’on allait tout de même bosser ensemble. Mais apparemment… Moi, je voulais juste sortir mon disque, je m’en foutais de l’aspect financier.

A l’avenir, avec quels artistes souhaiterais-tu collaborer ?

Des artistes hors-rap. Tété par exemple.

SOURCE : http://www.booska-p.com/new-nakk-l-interview-n6722.html

Journaliste et rédacteur.